Ils ont été découverts pour la première fois sur une plage de Santiago du Chili en 2013. Et ces virus gargantuesques sont bien loin de votre variété de jardin, virus sub-microscopique.
Non seulement les membres de la famille des pandoravirus sont stupidement énormes, mais ces microbes possèdent également plus de gènes que n’importe quel virus n’a pas à en porter. Aujourd’hui, la découverte de trois nouveaux membres pourrait enfin nous aider à comprendre pourquoi ils sont si grands, et nous conduire potentiellement aux origines de tous les virus.
Une nouvelle analyse menée par des chercheurs français a révélé que, malgré toutes les similitudes structurelles et fonctionnelles entre les membres du Pandoraviridae, les six exemples connus de ces poids lourds viraux ont étonnamment peu de gènes en commun.
Étant donné leur taille, il est étrange de penser que des virus de la taille d’un roi comme ceux-ci sont si nouveaux pour la science. Mais leur taille est précisément la raison pour laquelle ils sont restés cachés pendant si longtemps.
La première famille de mégavirus a été décrite dans la littérature en 2003 ; elle a été baptisée Mimiviridae après avoir été confondue avec une petite bactérie à Gram positif. La plupart des particules virales sont mesurées à l’échelle d’une poignée de nanomètres, mais pas cette “imitation de bactérie” – elle est des centaines de fois plus grande, atteignant un peu moins d’un micromètre.
En recherchant d’autres exemples de Mimivirus dans les cellules d’amibes où ils vivent, les chercheurs sont tombés sur un deuxième monstre d’une taille tout aussi impressionnante.
Les détails de deux nouvelles espèces de Pandoravirus ont été publiés en 2013. L’un a été trouvé dans des sédiments sur la plage de Tunquen au Chili. L’autre a été isolé à partir d’amibes se reproduisant dans un bassin à côté de l’université de Latrobe en Australie.
Un troisième a été identifié rétroactivement deux ans plus tard dans une étude de cas d’amibes contaminant l’étui à lentilles de contact d’une femme diagnostiquée avec une kératite en 2008.
La plupart des virus n’ont généralement pas besoin de beaucoup de gènes pour se reproduire – le peu qu’ils possèdent est utilisé pour détourner efficacement la machinerie cellulaire d’autres organismes. Mais les virus gigantesques font ici une autre exception.
Comme les Mimivirus, les Pandoravirus ont des génomes de grande taille, à la mesure de leur envergure. Le détenteur du record actuel est Pandoravirus salinus, avec un énorme 2 473 paires de kilobases. Alors pourquoi transporter autant de choses alors que l’évolution tend à encourager les autres virus à voyager léger ?
Un indice pourrait résider dans la nature de ces gènes. Des recherches antérieures avaient montré que seulement 7 % d’entre eux correspondaient à des gènes présents dans d’autres organismes, ce qui indique qu’ils représentent clairement une voie d’évolution différente.
Les gènes qui sont uniques à une seule branche de l’arbre de vie sont qualifiés d'”orphelins”. La découverte récente de deux nouvelles espèces de pandoravirus porte le total à six, et ces gènes orphelins ont enfin pu être comparés en détail.
Le premier choc a été de constater qu’ils étaient tous uniques.
Non seulement ils étaient orphelins dans le sens où ils ne correspondaient à ceux d’aucune autre espèce, mais ils étaient aussi complètement différents des gènes des autres Pandoravirus.
Mais c’est la deuxième surprise qui a donné aux chercheurs une idée de ce qui se passait. Les gènes orphelins contenaient des signatures de régions “intergéniques” non codantes.
Cela donne l’impression que les virus produisent de nouveaux gènes sur mesure à partir d’un fouillis bruyant de codes non fonctionnels, plutôt que de les hériter d’un ancêtre commun et de les ajuster ensuite par des mutations.
“Si cela s’avère vrai, la longue quête de l’origine évolutive des gènes des virus géants prendra fin”, déclare l’auteur principal Jean-Michel Claverie, du Laboratoire d’information structurale et génomique.
Cela placerait ces virus dans une branche plutôt intéressante de la biologie, où les gènes sont couramment créés à partir de zéro plutôt que d’être modifiés à partir d’une bibliothèque préexistante.
Maintenant que nous savons ce qu’il faut rechercher, des virus massifs apparaissent partout. Au début de cette année, la découverte de deux nouvelles souches de la famille des Mimiviridae au Brésil s’est révélée être dotée de gènes codants incroyablement complexes.
Leur taille, leur complexité et leur caractère unique parmi les virus apportent un éclairage indispensable sur l’évolution de cet élément marginal de la biologie.
Le débat est loin d’être tranché. Mais cette nouvelle découverte ajoute une perspective intéressante qui pourrait suggérer que les origines de nombreux virus, sinon tous, se trouvent parmi les racines les plus profondes de l’arbre de la vie.
Cette recherche a été publiée dans Nature Communications.