la Terre devrait encore se réchauffer de plus de 3 degrés Celsius d’ici la fin du siècle, malgré une baisse des émissions de gaz à effet de serre causée par la pandémie et les engagements pris pour réduire la pollution, a déclaré l’ONU mercredi.
Dans son évaluation annuelle des niveaux d’émissions, le Programme des Nations unies pour l’environnement a constaté que la baisse de 7 % de la pollution par le carbone prévue pour 2020 aurait un “impact négligeable” sur le réchauffement sans un abandon large et rapide des combustibles fossiles.
Le rapport sur le déficit d’émissions analyse le fossé entre les mesures requises dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat et les réductions d’émissions actuellement prévues par les pays.
Il a constaté qu’une “pandémie, dans laquelle les promesses de réduction nette à zéro sont accélérées, pourrait réduire les émissions de 25 % d’ici à 2030
Le monde se rapprocherait ainsi des niveaux requis pour limiter le réchauffement à 2°C, comme le stipule la convention de Paris.
Avec un peu plus de 1 °C de réchauffement depuis l’ère préindustrielle, la Terre connaît déjà des sécheresses plus fortes et plus fréquentes, des incendies de forêt et des super-tempêtes rendues plus meurtrières par la montée des eaux.
“De toute évidence, le monde s’est enfermé. Pendant cette période, nous avons vu une baisse de 7 % des émissions”, a déclaré à l’AFP Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE.
“Mais nous savons aussi que la réponse n’est pas de verrouiller le monde et d’avoir 1,9 milliard d’enfants non scolarisés”.
Elle a déclaré que le rapport de mercredi montrait qu’une relance verte de la pandémie “peut retirer une énorme part des émissions de gaz à effet de serre et contribuer à ralentir le changement climatique.”
Le PNUE a déclaré l’an dernier que les émissions devaient diminuer de 7,6 % par an jusqu’en 2030 pour que l’objectif plus ambitieux de 1,5 °C fixé à Paris puisse être atteint.
Si l’année 2020 devrait voir les émissions diminuer dans une large mesure par rapport à ce chiffre, il aura fallu un ralentissement sans précédent de l’industrie, des voyages et de la fabrication pour y parvenir.
Les experts craignent qu’un rebond des émissions de carbone soit presque inévitable en 2021 ; la semaine dernière, l’ONU a déclaré que les pays prévoyaient d’augmenter la production de combustibles fossiles de 2 % chaque année au cours de la décennie.
Pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, l’ONU a déclaré que la production de pétrole, de gaz et de charbon devait diminuer de 6 % par an.
Selon l’évaluation de mercredi, les émissions en 2019 – une année dont les scientifiques espèrent encore qu’elle représentera un pic de la pollution annuelle par le carbone – s’élevaient à 59,1 gigatonnes d’équivalent CO2.
Cela représente une augmentation de 2,6 % par rapport à 2018, en grande partie due à une augmentation des feux de forêt, a indiqué le PNUE.
Au total, la Terre est toujours en passe de se réchauffer de plus de 3°C d’ici 2100 – une hausse de température qui déplacerait des centaines de millions de personnes en raison de la montée des mers, des mauvaises récoltes et des conditions météorologiques de plus en plus extrêmes, comme les sécheresses et les tempêtes.
Inégalité des émissions
Selon l’étude, la réduction des déplacements, de l’activité industrielle et de la production d’électricité pendant la pandémie permettrait de réduire les émissions de 7 % par rapport à l’année dernière.
Mais cela ne se traduirait que par une réduction de 0,01°C du réchauffement climatique d’ici à 2050.
Le PNUE a indiqué qu’en cas de reprise verte après l’épisode COVID-19, les émissions atteindraient 44 GT en 2030, contre 59 GT prévus, ce qui donnerait à l’humanité 66 % de chances de maintenir la hausse des températures en dessous de 2°C.
Pour y parvenir, il faudrait passer à grande échelle aux énergies renouvelables, soutenir directement les technologies et infrastructures à émissions nulles, réduire les subventions aux combustibles fossiles, ne pas construire de nouvelles centrales au charbon et procéder à un reboisement généralisé.
Pourtant, il semble que le soutien aux industries très polluantes soit déjà prévu dans le plan de relance, puisque seul un quart des pays du G20 consacre des parts de dépenses à des mesures à faible émission de carbone.
Le rapport a également mis à nu la grande inégalité de la pollution par le carbone : les 1 % les plus riches sont responsables de plus du double des émissions combinées des 50 % les plus pauvres.
Selon le PNUE, ce groupe doit diviser par 30 son empreinte carbone pour rester en phase avec les objectifs de Paris.
Tim Gore, responsable de la politique climatique chez Oxfam, a déclaré que le rapport de mercredi montrait qu’il était “pratiquement et politiquement impossible de combler le fossé des émissions si les gouvernements ne réduisent pas l’empreinte carbone des riches.”
© Agence France-Presse