Les scientifiques n’ont jamais été aussi près de pouvoir utiliser le graphène comme supraconducteur – pour conduire l’électricité avec une résistance nulle – ce qui le rend utile pour développer des gadgets à haut rendement énergétique, améliorer la recherche médicale, moderniser les réseaux électriques, et bien d’autres choses encore.
La clé de cette nouvelle approche consiste à chauffer un cristal de carbure de silicium (SiC), lui-même supraconducteur, jusqu’à ce que les atomes de silicium se soient tous évaporés. Cela laisse deux couches de graphène l’une sur l’autre de manière à ce que, dans certaines conditions, elles n’offrent aucune résistance au courant électrique.
Une approche similaire à deux couches a également été utilisée avec succès pour transformer le graphène en supraconducteur plus tôt cette année. La différence ici est que les couches n’ont pas besoin d’être soigneusement inclinées l’une sur l’autre, ce qui devrait faciliter leur reproduction à l’échelle.
Techniquement parlant, les scientifiques ont trouvé une structure de bande plate où les électrons ne rencontrent aucune résistance, de sorte qu’ils peuvent circuler librement quel que soit leur niveau d’énergie.
Les chercheurs ont déjà étudié le graphène à deux couches, car il s’agit d’un semi-conducteur bien connu. Mais cette fois, les chercheurs ont repéré dans les couches un élément jusqu’alors inaperçu.
“Il s’agit d’une propriété cachée d’un système bien étudié”, explique l’un des chercheurs, Dmitry Marchenko, de l’institut Helmholtz-Zentrum Berlin (HZB) en Allemagne. “On ignorait jusqu’à présent l’existence d’une zone plate dans la structure de bande d’un système aussi simple et bien connu.”
Les scientifiques ont déterminé que l’interaction entre les couches de graphène, ainsi que les effets du réseau de carbure de silicium, étaient conjointement responsables de la création de la bande plate.
Ils ont utilisé une technique spéciale appelée spectroscopie de photoémission à résolution angulaire (ARPES) pour déterminer le comportement des électrons à très haute résolution. Cette technique a été rendue possible par l’accélérateur de particules synchrotron BESSY II de HZB.
Une autre condition nécessaire à la supraconductivité est l’atteinte d’un certain niveau d’énergie, appelé niveau d’énergie de Fermi. Les deux couches de graphène testées ici se sont suffisamment rapprochées de ce point pour que les chercheurs pensent qu’elles pourraient être modifiées pour s’y adapter relativement facilement.
“Nous pouvons prédire ce comportement avec très peu de paramètres et nous pourrions utiliser ce mécanisme pour contrôler la structure de la bande”, explique l’un des membres de l’équipe, Oliver Rader, de HZB.
Bien que nous ayons déjà vu le graphène agir comme un supraconducteur, cette dernière étude le rapproche plus que jamais d’un produit qui pourra être mis à l’échelle et utilisé dans la vie quotidienne. Certains succès précédents ont été obtenus en ajoutant d’autres métaux au graphène, mais ici, c’est le graphène qui fait tout le travail tout seul.
Les scientifiques affirment que la technique est prometteuse pour fonctionner également à des températures élevées, contrairement aux conditions de très basse température observées dans les efforts précédents pour faire du graphène un supraconducteur, et sur lesquelles cette recherche est basée.
Le graphène continue de nous surprendre par les merveilleuses possibilités qu’il offre : la couche de graphite d’un atome d’épaisseur est ultra-mince mais plus dure que le diamant et plus solide que l’acier. Son potentiel s’étend de l’énergie solaire à la purification de l’eau.
Dans son état d’origine, le graphite est déjà un excellent conducteur d’électricité, et il semble que nous nous rapprochions maintenant du summum de la conductivité, et ce grâce à certains des instruments scientifiques les plus avancés dont nous disposons.
La recherche a été publiée dans Science Advances.